Modifications aux obligations des conducteurs de véhicules lourds
La vérification avant départ n’est plus, bienvenue à la « ronde de sécurité » !
Dès 2005, la Loi concernant les propriétaires et exploitants de véhicules lourds[1], et certaines autres dispositions ont été modifiées législativement afin d’harmoniser le droit en vigueur au Québec avec celui au niveau fédéral, et ce, avec l’objectif évident de faciliter le transport interprovincial.
Pour compléter cette réforme du droit des transports, des changements se sont échelonnés sur plusieurs années. La dernière étape est la modification du Code de la sécurité routière[2] et plus particulièrement le Règlement sur les normes de sécurité des véhicules routiers[3] qui entre en vigueur le 20 novembre 2016. Ces changements touchent précisément les conducteurs de véhicules lourds en ce sens qu’ils modifient complètement le Chapitre IV [4] dudit règlement concernant la « vérification par le conducteur ».
Lorsqu’on l’analyse plus attentivement, cette métamorphose peut être résumée en cinq points majeurs :
1 — La « Vérification avant départ » transformée en « Ronde de sécurité » :
La principale évolution touche le protocole que le conducteur doit effectuer avant de prendre la route avec son véhicule lourd, puisque la « vérification avant départ » n’existe plus, elle a été remplacée par la « ronde de sécurité ».
Cette modification est bien plus que seulement terminologique, le gouvernement change substantiellement l’obligation des chauffeurs de véhicules lourds lorsqu’ils prennent la route.
La nouvelle norme, appelée la « ronde de sécurité », vise les mêmes objectifs que la vérification avant départ, soit, par un examen visuel et auditif des éléments accessibles, déceler le plus tôt possible les défectuosités pour en informer rapidement l’exploitant afin d’éviter que soit sur la route un véhicule susceptible de causer un accident.
La « ronde de sécurité » vise sensiblement les mêmes aspects, mais on a profité de la modification pour faire un rafraichissement des éléments mécaniques qui doivent être traités.
La grande nouveauté avec cette « ronde », c’est qu’elle est valide pour 24 heures. Au lieu de devoir réaliser une vérification mécanique du véhicule à chaque nouveau départ, les conducteurs n’ont qu’à contresigner le rapport de la ronde de sécurité effectué plus tôt pour qu’elle soit valide.
L’obligation du conducteur devient donc de s’assurer qu’une ronde de sécurité a été complétée dans les 24 dernières heures sur le véhicule avant de prendre le volant.
L’autre différence majeure est que la « ronde » peut être effectuée par une personne désignée par l’exploitant qui n’est pas nécessairement le chauffeur.
Dans ce cas, lorsque le chauffeur veut quitter avec son véhicule, il peut ;
– Accepter la ronde; S’il l’accepte, il la contresigne, mais il n’en ait pas responsable. Toutefois, il doit quand même tenir à jour le rapport et signaler les problématiques rencontrées en cours de route.
– Refuser la ronde; S’il refuse de contresigner le rapport déjà fait, il devra refaire la ronde et en prendre la responsabilité.
Il est à noter que le non-respect des exigences de la nouvelle règlementation sur la ronde de sécurité occasionne les mêmes conséquences qu’une omission de se conformer aux vérifications avant départ. On le rappelle, il s’agit d’une infraction qui entraîne une sanction de 3 points au dossier PEVL de l’exploitant du véhicule lourd, ainsi qu’une perte de 3 points au dossier de conducteur du chauffeur en défaut. Il est donc primordial de s’assurer que la nouvelle règlementation soit respectée et il est dans l’intérêt autant de l’exploitant que du conducteur de s’assurer que ce soit respecté.
Le conducteur ayant procédé à la ronde ou qui a contresigné une ronde aura également l’obligation de faire parvenir l’original du rapport de ronde de sécurité à l’exploitant dans les 20 jours suivant sa rédaction. De plus, s’il constate une défectuosité majeure, il doit avertir l’exploitant sans délai et lui remettre une copie du rapport. Il va sans dire que le véhicule ne pourra pas reprendre la route avant que la défectuosité majeure soit réparée, sous peine de voir imposer une mise hors service. S’il découvre une défectuosité mineure, il devra l’inscrire dans le rapport de ronde de sécurité et transmettre une copie du rapport à l’exploitant au plus tard à l’échéance de la ronde de sécurité en cours, soit dans les prochaines 24 heures.
L’exploitant, quant à lui, à l’obligation de conserver pour une période de 6 mois une copie des documents relatifs à la ronde de sécurité, et ce, pour chaque véhicule lourd.
2 — Une nouvelle vérification spécifique aux autocars
De par leur configuration particulière, les autocars sont visés par des règles qui leur sont propres.
En effet, le nouveau règlement ajoute des dispositions spécifiques à ces véhicules, qui n’ont d’ailleurs pas les mêmes éléments à vérifier que les véhicules lourds en général.
Les autocars doivent donc se conformer à une nouvelle vérification mécanique qui leur ait propre s’ils ne sont pas visés par le programme d’entretien préventif (PEP) reconnu.
3 — Un meilleur contrôle de qualité des programmes d’entretien préventif (PEP)
La nouvelle réglementation définit les motifs de révocation d’un certificat de reconnaissance du propriétaire de véhicules routiers auquel s’applique le programme d’entretien préventif, afin de permettre à la SAAQ d’intervenir plus facilement et plus rapidement lorsque des lacunes sont constatées.
4 —Modifications et des ajouts aux défectuosités mineures et majeures
Sous l’ancienne législation, les éléments à considérer lors de la vérification mécanique par le chauffeur se regroupaient principalement 14 items, les défectuosités mineures et majeures devaient être notées dans son rapport de vérification.
À partir du 20 novembre 2016, la personne responsable de la ronde de sécurité a une liste de 19 éléments à vérifier, et chaque défectuosité mineure et majeure se voit attribuer un code. Bien qu’il y ait plus d’éléments à vérifier, les nouvelles règles sont plus limpides et faciliteront la tâche des conducteurs, en indiquant clairement chaque élément à vérifier.
Pour plus information, le site internet de la commission des transports du Québec a mis en ligne un tableau des nouvelles défectuosités mécaniques mineures et majeures , afin d’aider les responsables à se conformer à la nouvelle loi.
5 —Modalités d’application de la vérification mécanique
De nouveaux véhicules sont désormais soumis à la vérification mécanique périodique, les véhicules des écoles de conduite et ceux utilisés pour des évènements spéciaux doivent maintenant être vérifiés annuellement par exemple.
En conclusion, les modifications apportées à la loi la rendent plus complète et faciliteront les transports interprovinciaux en uniformisant les rondes de sécurité.
Par l’instauration d’une fiche détaillée de chaque défectuosité mineure et majeure, les chauffeurs sauront avec précision quels éléments vérifier et s’ils peuvent ou non prendre la route.
De plus, cette nouvelle réglementation simplifiera la tâche aux propriétaires et exploitants de véhicules lourds également, en leur permettant entre autres de désigner une personne pouvant effectuer la ronde de sécurité qui sera valide pour 24 heures, évitant ainsi au conducteur une vérification mécanique avant départ, n’ayant qu’à contresigner la ronde effectuée par la personne désignée dans les délais. Le rapport permettra également aux exploitants de savoir précisément quel élément est défectueux, n’ayant besoin que du code de défectuosité pour cibler précisément l’élément à réparer.
Pour toutes informations précises ou pour une opinion juridique applicable à votre situation, n’hésitez pas à entrer en contact avec nous.
[1] Loi concernant les propriétaires, les exploitants et les conducteurs de véhicules lourds 2005, c. 39, a. 1.
[2] Code de la sécurité routière LRQ, c C-24.2
[3] Règlement sur les normes de sécurité des véhicules routiers RLRQ c C-24.2, r 32
[4] Version avant modifications (avant le 20 novembre 2016) http://canlii.ca/t/69vnt
Version après modifications (après le 20 novembre 2016) http://canlii.ca/t/1ct7
Publié le 18 novembre 2016 par Me Francis Boucher dans Code de la sécurité routière, Conduite automobile (Alcool au volant, délit de fuite, conduite dangereuse, SAAQ), Pénal, Permis (alcool, jeux, commission des transports).